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Covid-19 : Le secteur aéronautique va-t-il se crasher dans le monde d’après ?

Dernière mise à jour : 24 nov. 2020


Sinistré. Voici l’adjectif qui revient le plus souvent quand les médias et analystes évoquent les conséquences de la pandémie de coronavirus sur le secteur aéronautique. Le lien entre le virus et l’aviation est encore plus prégnant. On ne sait presque plus si c’est le Covid-19 qui a touché les compagnies aériennes ou le trafic aérien qui est responsable du développement de la maladie. « Si vous imprimez une carte de la pandémie du coronavirus et que vous la collez à la carte des vols aériens intercontinentaux, vous voyez que ça se recouvre à 100 %. » constatait le 16 mars dernier, Philippe Sansonetti, titulaire de la chaire Microbiologie et maladies infectieuses, lors d'une conférence au Collège de France. Le parallèle en est déroutant. Au point que le fameux monde d’après, censé naître de la crise sanitaire et financière, voudrait remettre en cause presque fondamentalement le fonctionnement du secteur aéronautique.


État des lieux : Quelques chiffres


➡ Plus de 90% de la flotte mondiale a été immobilisé pendant la crise. ➡ L'aviation civile mondiale fait un bond en arrière de 10 ans en volume d'activité. ➡ L'Association internationale du transport aérien (IATA) chiffre les pertes des compagnies aériennes mondiales à 84 milliards de dollars de pertes nettes en 2020 et plus de 15 milliards encore l'année prochaine. En comparaison elles avaient perdu 31 milliards de dollars lors de la crise financière de 2008.


Réactions : Sauvetage de l’Etat et licenciements


➡ Pour contrer les pertes massives, l’Etat français a annoncé en juin un plan d'urgence de plus de 15 milliards d’euros au profit du secteur aérien. ➡ Des mesures similaires ont été prises un peu partout dans le monde. Le gouvernement de Hong Kong dégage par exemple 5 milliards de dollars pour sauver la compagnie fanion du territoire, Cathay Pacific. ➡ Malgré l’aide de l’Etat, des géants français de l’aérien ne pourront éviter les licenciements. L'avionneur Airbus envisage la suppression de près de 15.000 postes à travers le monde dont 4.000 en France d'ici à l'été 2021. ➡ Le groupe Air France compte lui supprimer plus de 7.500 postes d'ici fin 2022. ➡ D’après le cabinet Archery Strategy Consulting cité dans un dossier d’Air & Cosmos publié mi-avril, il faudra au moins trois ans pour retrouver le niveau de 2019 et au moins dix ans pour rattraper la trajectoire d’avant-crise.


L'aéronautique du monde d’après : L’écologie, vraiment ?


➡ En contrepartie de l’aide de l’Etat, la filière s’est engagé à mettre sur le marché 10 ans plus tôt que prévu un avion peu gourmand en ressources pouvant fonctionner avec plusieurs types de carburants alternatifs durables ou un avion décarboné à base d’hydrogène. Cet avion vert, qui était initialement prévu vers 2045, pourrait entrer en service dès 2035. L'aéronautique doit se réinventer. Le secteur vit un moment charnière de son histoire : les enjeux environnementaux et sanitaires pèsent, le déploiement des services agite les compagnies, les problématiques de connectivité à bord et de digitalisation ne sont pas résolus, la valorisation des données de vol non plus, etc. Dans L’Usine Nouvelle, un ancien cadre dirigeant d’un grand groupe aéronautique français dénonce : « Les entreprises du secteur peinent à sortir de ce qu’elles savent faire depuis plus de cinquante ans. Ils innovent excellemment de manière incrémentale, mais tuent dans l’œuf tout changement de paradigmes. Les avions commerciaux n’ont d’ailleurs pas beaucoup évolué depuis un demi-siècle. » Quand reprendront les voyages d’affaires ? Les déplacements professionnels en avion sont un des enjeux de l'aéronautique version post-Covid. Les voyages d’affaires représentent, pour les compagnies traditionnelles comme Air France, British Airways ou Luftansha, en moyenne 30% du chiffre d’affaires pour seulement 5,4% des passagers, d’après une étude américaine. Ces passagers, prêts à payer pour du service, du confort et de la flexibilité ont l’autre avantage de répartir leurs trajets en semaine de manière constante et régulière, là où les vacanciers partent tous au même moment. Problème, selon un sondage réalisé fin mai par la GTBA (Global Business Travel Association), près de deux tiers des entreprises (65%) ont annulé ou suspendu tous les voyages d’affaires depuis le début de l’épidémie en France. Les autres ont fortement réduits la voilure à part pour les déplacements indispensables. Visioconférences et télétravail se sont imposées par la force du contexte et semblent en passe de se pérenniser dans le fonctionnement de nombreuses structures. Avec ces changements, les vols d’affaires plusieurs fois par semaine flairent un peu l’ancien monde. Xavier Tytelman, consultant aéronautique chez CGI Consulting, prédit que les compagnies traditionnelles pourraient perdre des passagers au profit des spécialistes de vols privés. « Etant donné que les prix de la classe Business risquent d’augmenter, voit le spécialiste, le gap avec les jets privés sera de plus en plus faible. Quand vous faites voyager trois ou quatre personnes en Business, la différence de coûts avec les jets privés est déjà devenue ridiculement faible. Et pour ce qui est des précautions sanitaires, le jet, c’est le rêve ». Sans oublier, souligne BFM TV, que les industriels développent des jets 100% électriques qui pourraient entrer en service d’ici quelques années sur des courts trajets.



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